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Collectivités : Ce que la loi d'accélération des ENR change pour vous

Marjolaine Ratier • mars 09, 2023

Retour sur quelques nouveautés pour les collectivités territoriales dans la loi relative à l’accélération des énergies renouvelables (10 janvier 2023)


  • Par Jean COCHET, Consultant (Droit de l'Energie, de l'Union Européenne, de l'Environnement)



Parmi les dispositions de la loi d’accélération EnR adoptée le 7 février 2023, certaines intéressent directement les collectivités territoriales dans leur rôle d'acteurs de la transition énergétique.



Mémo: Quels sont les objectifs du projet de loi d'accélération de la production d'énergies renouvelables ?


Ce projet de loi entend concilier l’amélioration de l’acceptabilité locale avec l’accélération du déploiement des énergies renouvelables. Il favorise le déploiement des énergies renouvelables tout en garantissant la protection de la biodiversité et en minimisant l’artificialisation des sols. Il tient compte, dans l’esprit de concertation qui anime l’action du Gouvernement, des échanges avec l’ensemble des associations, organisations et parties prenantes rassemblées au sein du Conseil national de la transition écologique.


Le projet de loi se structure ainsi autour de quatre piliers :


  1. Accélérer les procédures
  2. Libérer le foncier nécessaire
  3. Accélérer le déploiement de l’éolien en mer
  4. Améliorer le financement et l’attractivité des projets d’énergie renouvelable




Le texte, objet d’une saisine du Conseil constitutionnel[1], est largement discuté par les acteurs de l’énergie quant à son efficacité pour accélérer le développement de projets renouvelables. Sans se prononcer trop en amont sur ce point, de nombreux décrets d’application étant attendus pour préciser des dispositions, il est possible d’attribuer à ce projet de loi une vertu de canalisation ou d’encadrement.


S’agissant des collectivités, qui bénéficient de nouvelles compétences dans le cadre d’un processus déjà engagé de décentralisation, elles ne sont pas en reste avec la présente loi d’accélération. Ainsi, nous pouvons présenter quelques-unes des dispositions majeures qui les intéressent directement.



accélération des ENR zones d'accélération

Accélération des ENR : 

Zoom sur les zones d’accélération


Les zones d’accélération font sémantiquement écho aux « zones favorables » ou aux « zones propices » des textes européens. La question de la concordance avec le droit européen est notamment au cœur de la saisine du Conseil constitutionnel.

La procédure pour établir ces zones d’accélération, quoique longue d’environ 2 à 4 ans, donne aux communes la responsabilité d’identifier en premier lieu celles-ci, après délibération du conseil municipal. Elles peuvent se baser sur les informations disponibles pour l’implantation des énergies renouvelables publiées par l’Etat et les gestionnaires de réseaux[2]. Elles peuvent également être accompagnées par le référent préfectoral, créé à l’occasion de cette loi d’accélération, ou leur EPCI. Une concertation avec le public doit être organisée au cours de cette phase selon des modalités librement déterminées par la commune. Le délai global pour l’identification des zones est de 6 mois.


Après débat de l’EPCI, le référent préfectoral arrête la cartographie des zones et la transmet pour avis au comité régional de l’énergie[3]. Une conférence territoriale est ensuite réunie pour consultation.


L’avis du comité régional de l’énergie peut alors conclure en deux sens :


  • Les zones identifiées sont suffisantes pour l’atteinte des objectifs régionaux : alors le référent préfectoral arrête ces zones après avis conforme des communes, c’est-à-dire un avis contraignant;


  • Les zones identifiées ne sont pas suffisantes pour l’atteinte des objectifs régionaux : le référent préfectoral demande alors au commune d’identifier des zones complémentaires qui sont de nouveau soumises à la procédure précisée en amont (avis du comité régional, arrêt par le référent préfectoral, avis conforme des communes).


Ces zones seront ensuite intégrées aux PLU, SCoT et cartes communes ainsi qu’aux documents de planification (SRADDET, SRCAE, PCAET).





accélération ENR obligation de solariser

Accélération des ENR : 

Zoom sur l’obligation de solariser

certains bâtiments et parcs de stationnement 


Sur les parcs de stationnement


Une obligation d’installer des ombrières photovoltaïques est posée pour les parcs de stationnements de plus de 1.500 m2, sur au moins la moitié de leur surface, pour les nouveaux parcs de stationnement extérieurs.


S’agissant des parcs de stationnement extérieurs existants au 1er juillet 2023, l’obligation s’applique :


  • Au 1er juillet 2026 pour les parcs gérés en contrats de concession ou DSP renouvelés avant le 1er juillet 2026 et au 1er juillet 2028 pour ceux renouvelés après le 1er juillet 2028 ;
  • Pour les autres, au 1er juillet 2026 si la superficie est supérieure à 10.000 m2 et au 1er juillet 2028 pour les superficies inférieures.


Sur les bâtiments


Historique


La loi énergie-climat du 8 novembre 2019 crée une obligation d’intégrer soit un procédé de production d’énergies renouvelables, soit un système de végétalisation sur au moins 30% de la toiture de certaines nouvelles constructions[4] de plus de 1.000 m2 d’emprise au sol.


La loi climat-résilience du 22 août 2021 étend l’obligation, à compter du 1er juillet 2023, pour les nouvelles constructions, la rénovation lourde ou l’extension, en fonction des types de bâtiments :


  • Pour les bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal, les entrepôts, hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale de plus de 500 m2 d’emprise au sol ;
  • Pour les bâtiments à usage de bureaux de plus de 1.000 m2 d’emprise au sol.

 

La présente loi d’accélération des énergies renouvelables porte désormais l’obligation d’intégrer un procédé de production d’énergies renouvelables ou un système de végétalisation en toiture de certains bâtiments existants :


  • « Les bâtiments ou parties de bâtiments à usage commercial, industriel, artisanal ou administratif, les bâtiments ou parties de bâtiments à usage de bureaux ou d’entrepôt, les hangars non ouverts au public faisant l’objet d’une exploitation commerciale, les hôpitaux, les équipements sportifs, récréatifs et de loisirs, les bâtiments ou parties de bâtiments scolaires et universitaires et les parcs de stationnement couverts accessibles au public, ayant une emprise au sol au moins égale à 500 mètres carrés » (nouvel article L171-5 du Code de la construction et de l’habitation). Cette obligation s’applique à compter du 1er janvier 2028.



Autoconsommation individuelle et collective - ENR

Accélération des ENR : 

Zoom sur l’autoconsommation individuelle et collective


La loi d’accélération des énergies renouvelables ancre la possibilité, pour les collectivités, de recourir aux contrats de la commande publique pour les opérations d’autoconsommation individuelle et collective afin de répondre à leurs besoins en électricité renouvelable (nouvel article L. 331-5) et en gaz renouvelable[5], dont le biogaz, ou en gaz bas carbone[6] (nouvel article L. 441-6).


Par ailleurs, l’obligation de constituer une régie (article L.1412-1, alinéa 1) est levée lorsque les collectivités, leurs établissements publics, les EPCI ou les syndicats mixtes exploitent une installation de production d’électricité photovoltaïque inférieure à un certain seuil de puissance défini par arrêté, dans le cadre d’une opération d’autoconsommation. Cette mesure constitue une économie de procédure, parfois dissuasive, pour les collectivités de taille modeste.


La loi crée également le cadre de l’opération d’autoconsommation collective étendue en gaz, caractérisée « lorsque la fourniture de gaz renouvelable est effectuée entre un ou plusieurs producteurs et un ou plusieurs consommateurs finals liés entre eux au sein d’une personne morale dont les points de consommation et d’injection sont situés sur le réseau public de distribution de gaz ». Certains critères de proximité géographique seront fixés par arrêté.


Exemple pour l’opération d’autoconsommation étendue en électricité


Pour l’électricité les critères sont :

  • être sur le réseau basse tension (d’un même GRD), à une distance maximale de 2 km et d’une puissance cumulée inférieure à 3MW sur le territoire métropolitain continental et 0,5 dans les ZNI. 

 


agrivoltaisme

Accélération des ENR : 

Zoom sur l’agrivoltaïsme 


Les installations agrivoltaïques disposent désormais d’un cadre juridique. En matière de définition, est agrivoltaïque l’ « installation de production d’électricité utilisant l’énergie radiative du soleil et dont les modules sont situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole. ».


Plusieurs critères sont posés. L’installation doit permettre au moins l’un des quatre services mentionnés et ne porter une atteinte substantielle à aucun d’entre eux (ou une atteinte limitée à deux de ces services) :


  • 1) L’amélioration du potentiel et de l’impact agronomiques ;
  • 2) L’adaptation au changement climatique ;
  • 3) La protection contre les aléas ;
  • 4) L’amélioration du bien-être animal.


Par ailleurs, la production d’électricité ne doit pas se substituer à la production agricole, en tant qu’activité principale de la parcelle, et elle doit être réversible.


Les collectivités peuvent alors inscrire les objectifs de développement de l’agrivoltaïsme dans différents documents de planification : SRADDET, SRCAE, PCAE. Par ailleurs, les maires et présidents d’EPCI devront être informés de chaque demande d’autorisation d’installation agrivoltaïque.



accélération ENR - PPA

Accélération des ENR : 

Zoom sur les contrats de vente directe d’énergies renouvelables 

(PPA : « power purchase agreement »)

La Loi d’accélération est l’occasion de créer un cadre juridique, jusqu’alors inexistant, aux contrats de vente directe d’énergies renouvelables.


Sans toutefois pouvoir trouver de définitions, est donnée aux pouvoirs adjudicateurs[7] et aux entités adjudicatrices[8] l’opportunité de recourir à des « contrats de vente directe à long terme d’électricité » (nouvel article L331-5) et des « contrats de vente directe à long terme de biogaz, de gaz renouvelable ou de gaz bas carbone », dans le cadre d’un contrat de la commande publique et dans les conditions prévues par le code de la commande publique.


Il est précisé que « La durée du contrat est définie en tenant compte de la nature des prestations et de la durée d’amortissement des installations nécessaires à leur exécution, y compris lorsque le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice n’acquiert pas ces installations. ».


Pour ces contrats de vente directe, ils peuvent désigner un producteur ou un fournisseur tiers, titulaire de cette autorisation, pour qu’il assume les obligations qui incombent aux fournisseurs.


Ce texte regorge de mesures, sans les consacrer pour autant dans un titre spécifique, destinées aux collectivités, dans un élan général de décentralisation. Ainsi, les dispositions en matière de domanialité, de communautés d’énergies renouvelables ou encore de partage territorial de la valeur, feront l’objet d’un développement ultérieur.




[1] Notamment sur : la raison impérative d’intérêt public majeur, la modulation annuelle du tarif de rachat de l’électricité produite, le fonds de garantie, l’obligation de solariser les nouvelles toitures industrielles (de plus de 500 m2) et les parcs de stationnement (de plus de 1.500 m2).

[2] Par exemple des cadastres solaires.

[3] Créés à l’occasion de la loi climat-résilience du 22 août 2021, leur composition est détaillée à l’article D. 141-2-3 (créé par le décret n°2023-35 du 27 janvier 2023).

[4] « aux nouvelles constructions soumises à une autorisation d'exploitation commerciale au titre des 1°, 2°, 4°, 5° et 7° de l'article L. 752-1 du code de commerce, aux nouvelles constructions de locaux à usage industriel ou artisanal, d'entrepôts, de hangars non ouverts au public faisant l'objet d'une exploitation commerciale ainsi qu'aux nouveaux parcs de stationnement couverts accessibles au public. » (Art. L111-18-1, II, Code de l’urbanisme)

[5] Défini comme « les gaz produits à partir de sources d'énergies renouvelables telles que définies à l'article L. 211-2 » (article L. 445-1)

[6] Défini comme « un gaz constitué principalement de méthane qui peut être injecté et transporté de façon sûre dans le réseau de gaz naturel et dont le procédé de production engendre des émissions inférieures ou égales à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de l’énergie. » (Article L. 447-1)

[7] Aux termes de l’article L1211-1 : « Les pouvoirs adjudicateurs sont : 1° Les personnes morales de droit public ; 2° Les personnes morales de droit privé qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont : a) Soit l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur ; b) Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur ; c) Soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur ; 3° Les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique constitués par des pouvoirs adjudicateurs en vue de réaliser certaines activités en commun."

[8] Aux termes de l’article L1212-1 : « 

Les entités adjudicatrices sont : 1° Les pouvoirs adjudicateurs qui exercent une des activités d'opérateur de réseaux définies aux articles L. 1212-3 et L. 1212-4 ; 2° Lorsqu'elles ne sont pas des pouvoirs adjudicateurs, les entreprises publiques qui exercent une des activités d'opérateur de réseaux définies aux articles L. 1212-3 et L. 1212-4 ; 3° Lorsqu'ils ne sont pas des pouvoirs adjudicateurs ou des entreprises publiques, les organismes de droit privé qui bénéficient, en vertu d'une disposition légalement prise, de droits spéciaux ou exclusifs ayant pour effet de leur réserver l'exercice de ces activités et d'affecter substantiellement la capacité des autres opérateurs économiques à exercer celle-ci. Ne sont pas considérés comme des droits spéciaux ou exclusifs les droits d'exclusivité accordés à l'issue d'une procédure permettant de garantir la prise en compte de critères objectifs, proportionnels et non discriminatoires.


  • Par Jean COCHET, Consultant (Droit de l'Energie, de l'Union Européenne, de l'Environnement)
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